Coup
9 juillet 2024Le coup se joue de bien des façons. Coup de théâtre ou du sort, il peut donner des résultats imprévus lors d’élections. C’est d’ailleurs à cette occasion, les élections, qu’apparaissent toutes sortes d’analystes, de chroniqueurs, de spécialistes et d’experts. C’est au point que l’on pourrait se demander si la politique n’existe pas uniquement pour les faire vivre. À propos d’élections, celles-ci furent-elles un coup d’épée dans l’eau ? Pendant la campagne, les coups bas plurent et parfois déplurent. Il est cependant certains que tout ceci succéda à un coup de foudre(s). Dépassé par les événements, le maître des horloges vit le temps lui échapper. Il dissolut fissa. Ce fut le coup de foudre(s) de Jupiter qui signait la fin d’amours improbables ( c’est ici l’occasion de placer cet adjectif lui-même improbable) entre son mouvement politique et lui-même.
Un coup pour rien ?
« On ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve » affirmait Héraclite. Prétendre faire de la politique autrement en appliquant les recettes d’autrefois rendait encore plus impossible la trempette tranquille à Brégançon et dans le ruissellement. Espérons que de ce coup de foudre ne naîtra pas une sidération néfaste et que les suites en seront fertiles. Ce n’est pas certain. Le mot arrogance volait le soir du deuxième tour sur les plateaux de télévision. Ceux qui en montraient le plus accusant les autres d’en faire étalage. Information, désinformation, manipulation : le monde politique n’avait pas encore fait sa mue. La fera-t-il un jour ?
À l’insu de notre plein gré
À l’époque où le dopage était un scandale dans le milieu du cyclisme, Richard Virenque fut « dopé à l’insu de son plein gré ». Le RN ne nous manipulerait-il pas à l’insu de notre plein gré ? Nous serions consentants parce que. Parce que les autres partis n’écoutent pas le peuple français. « Attendez, je vais vous dire, je vais vous expliquer, nous n’avons pas fait assez preuve de pédagogie, nous avons été trop subtils, trop intelligents… » Nos zélus nous parlent comme à des enfants lorsqu’ils pensent à nous parler. Le reste du temps, ils parlent entre eux. À qui s’adresse un invité des médias sinon à l’interlocuteur assis en face de lui ? L’échange se transforme vite en partie de pingpong dont chacun transgresse les règles. On se souvient même de Georges Marchais : « C’est peut-être pas votre question, mais c’est ma réponse. »
La météo politique actuelle est très agitée. Hautes pressions et dépressions se succèdent. De forts coups de vent secouent le paysage politique. Les précipitations furent de mise entre la dissolution et les élections législatives. Certains partis n’avaient pas assez préparé leurs positions et quelques débordements furent à déplorer. Ces bourrasques et les changements de cap qu’elles provoquèrent chez un Ciotti, une Marion Maréchal et d’autres rappellent la fameuse formule d’Edgar Faure, spécialiste des retournements de veste : « Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent. »
Coup de génie dans l’eau
La nomination de Rachida Dati à la culture fit sensation. Il se chuchota que le Président achetait ainsi « une marque » contre le RN. Jacques Chirac en eut souri et dit que le coup de génie a fait « pschitt ». Quel mépris pour la culture !
Au-dessus ou avec les partis ?
La Constitution de 58 avait été taillée sur mesures pour de Gaulle qui voulait « gouverner au-dessus des partis. » Cette voie a montré ses limites, s’est épuisée, figée dans le 49.3. Il faudra désormais gouverner avec les partis, et que ceux-ci sortent de la posture pour enfin apprendre à discuter. Nous rejoignons ici l’un des dadas de Talpa.
De la conversation
Dans son livre sur l’art de la conversation, Théodore Zeldin écrit : « La conversation ne se réduit pas à transmettre des informations ou à partager des émotions, ni à mettre des idées dans la tête des gens…Lorsque des esprits se rencontrent, ils ne se limitent pas à échanger des faits : ils les transforment, les remodèlent et en tirent d’autres implications, se lancent dans de nouvelles directions. La conversation ne se contente pas de battre les cartes : elle en crée de nouvelles…de la rencontre entre deux esprits naît une étincelle…. »
La bonne mesure
Mesdames et Messieurs nos élus, faites des étincelles ! Soyez meilleurs que vos rivaux, intellectuellement, moralement, concrètement, imaginativement. Ne vous plaignez pas qu’on vous a volé le résultat des élections. Ce subterfuge vrai : faux est vieux comme Trump, Fillon, Royal et bien d’autres. Nous ne vous faisons pas confiance pour que vous gémissiez en public. Soyez justement humains. Le Président en place est la démonstration que l’intelligence est indispensable pour gouverner, mais qu’elle n’est pas suffisante. Ne faites pas des coups, même de génie ; gardez la bonne mesure, la bonne distance pour demeurer ancrés dans la société et dans le monde. Proches.
Coups de pocker, ultime…
Savez-vous qui nous sommes ? Avant d’être des consommateurs, des électeurs nous sommes des personnes, des gens qui vivons en dehors des dossiers, des cartes électorales. La carte n’est pas le territoire. Le coup de pocker de Macron n’a pas fonctionné comme il l’espérait. Le coup de Marine recrutant Jordan et le faisant former à la com pour le tic toquer n’a pas emporté la mise ce coup-ci. Mélenchon qui s’égosille « Le Président doit s’incliner, il faut, il doit… » joue peut-être ( très mal) son dernier coup.
L’art de la communication vraie
Mesdames et Messieurs nos zélus, revenez à la source ! François de Sales est le saint patron des journalistes. Dès le XVI ème siècle, il avait compris qu’il ne faut pas pérorer mais s’adresser à un interlocuteur de chair et de sang. Qu’il faut adapter son discours à un interlocuteur particulier afin de l’intéresser directement au propos, à la situation et aux enjeux qui lui sont attachés.
Partage
Odon Vallet nous apprend que le demos de démocratie indique étymologiquement le fait de partager. « …on découpe les parts d’un gâteau comme les quartiers d’une commune ou les sièges d’une assemblée…Dans la démocratie, chacun doit avoir sa part sans mordre sur celle des autres. »
Un coup de dés jamais n’abolira le hasard, Stéphane Mallarmé.